she's brave but it's trapped inside ∂ emola

she's brave but it's trapped inside
Enola & Emma

Un petit sourire satisfait apparaît au coin de mes lèvres. Enfin ! Enfin je n'ai plus à me cacher, à le cacher. Mon ventre bien arrondi en ce cinquième mois bien entamé est désormais impossible à cacher et, je dois l'avouer, je suis bien heureuse de ne plus avoir besoin de le faire. Adieu les vêtements deux fois trop grands pour moi. Pourtant, la nouvelle n'a pas été prise de la meilleure façon qui soit. Dévoilée au cours d'un dîner des plus importants pour ma mère, de cette annonce s'en est suivie la pire remontrance jamais subite de ma vie. Si je le méritais ? Sans nul doute, mais je suis bien trop têtue pour le lui concéder. Outrée d'apprendre ma grossesse avec un autre homme que celui auquel j'étais promise – et dont je suis enfin débarrassée – le pire fut que cet enfant a été conçu hors mariage, un fait inadmissible au sein de notre monde. Quand bien même les principes de néphilims ont parfois tendance à m'agacer tant ils peuvent être vieillots, ils font tout de même partie de notre culture et je dois avouer que je n'aimerais pas que mon fils soit considéré comme un bâtard après sa naissance, raison pour laquelle notre mariage devra se faire au plus vite. Mais qu'importe, je suis désormais libérée du lourd poids que j'avais sur les épaules et n'ayant plus besoin de me cacher – quand bien même certains chasseurs d'ombres chuchotent à mon passage dans les couloirs de l'Institut – je peux me balader librement. Aujourd'hui, j'ai besoin d'être loin des nôtres, loin de leurs messes basses à mon sujet, loin du courroux de ma mère mais plus proche de ma sœur. Première à avoir été mise au courant de ma grossesse puisque je n'ai jamais rien pu lui cacher, c'est de sa présence dont j'ai besoin et c'est loin de notre chez nous que nous allons passer la journée.

Mon gros ventre mis en avant, il me vaut les meilleures places dans les transports en commun tandis que je rejoins le lieu de rendez-vous fixé avec Enola. Avec la naissance à venir de mon petit garçon, faire les boutiques m'a semblé être l'excuse parfaite pour entraîner ma cadette dans les rues de Chicago afin de passer du temps avec elle et surtout pour oublier ce monde sombre dans lequel nous continuons de grandir. La guerre fait toujours autant range dans le monde obscur et, parfois touchée par le pessimisme, je ne peux pas m'empêcher de penser que nous n'en verrons jamais le bout et que, pire encore, nous allons sans doute finir par perdre. Dans un soupire, je secoue la tête de gauche à droite afin de chasser ces pensées de mon esprit. Je me suis promis de ne pas me focaliser sur ça de la journée, il fait que je m'y tienne et enfin arrivée à destination, je descends du bus pour rejoindre le point de rendez-vous : l'entrée d'un petit café dans lequel je meurs d'envie d'aller m'asseoir tant je peux avoir mal au dos. Première car toujours craintive d'être en retard, je m'adosse contre un mur et sors mon téléphone pour envoyer un message à ma sœur. 'Si tu ne veux pas avoir ma mort sur la conscience, t'as intérêt d'être à l'heure. Ton neveu pèse lourd sur mes chevilles.' Un petit sourire et j'envoie le message, fière de ma pseudo menace. Toutefois, il est vrai que le poids du petit être que je porte en moi commence à se faire sentir. Mes douleurs au dos ne sont pas les seuls inconvénients ayant fait leur apparition. Entre essoufflements et une lenteur inouïe pour me déplacer, j'ai souvent l'impression de m'être transformée en boulet et que mes années d'entraînements ne servent strictement à rien ce qui, en toute franchise, est très frustrant.