Breaking the Habitfeat. Jazz McCoy
Ces moments où il y a impact, ces instants de grandes intensités qui chamboulent complètement nos vies finissent au bout du compte par nous définir… *
Assise sur le rebord de la fenêtre, les jambes pendantes dans le vide, la jeune femme observait les étoiles, leur disposition, leur façon de briller plus ou moins intensément, ne pouvant s’empêcher de se souvenir les nombreuses histoires que son père lui racontait quand elle était gamine, alors qu’ils étaient allongés au beau milieu du jardin. Il s’appliquait à ne jamais donner de fin à son histoire et quand Aurora lui avait un jour demandé pourquoi, il s’était contenté de répondre que c’était pour qu’elle puisse y donner celle qu’elle voulait, qu’elle soit bonne ou mauvaise… L’évocation de ces souvenirs lui serra doucement la gorge alors qu’elle posait ses mains sur le rebord. A l’époque, il lui laissait encore le choix, il ne concluait pas d’alliance l’impliquant si intimement sans lui demander son avis.
« tu épouseras Gabriel et il fera de même, la discussion est close. » Les mots de Nat Osborn résonnèrent dans sa tête alors qu’il la dominait, l’intimant au silence. Puis le visage du père fut remplacé par celui du fils. Gabriel, l’imprévisible Gabriel, celui pour qui son cœur s’emballait, cette relation destructrice mais tellement intense et dévorante…
Elle était perdue au milieu de tous ses sentiments, à fleur de peau… au plus grand bonheur de la louve en elle qui, toujours tapie dans l’ombre, attendait la moindre petite perte de contrôle, le plus infime excès pour pouvoir se manifester. Elle la sentait qui était là jamais bien loin à trépigner. Elle en avait les instincts mais elle ne pouvait pas se laisser aller, elle devait toujours se contrôler, la maîtriser. Elle savait que si elle se laissait submerger, elle deviendrait cette bête déchaînée, prédatrice, traqueuse se délectant de la chair de ses victimes.
Sa main s’était crispée sur le béton, et dès qu’elle s’en aperçut, elle reporta son attention sur le ciel nocturne, la lune continuait à se mouvoir de manière si imperceptible sur le coup mais qui progressivement balayait le ciel au rythme de la rotation terrestre. Elle ne se lassait jamais de ce spectacle, d’autant plus à présent, alors qu’elle était devenue une enfant de la lune. Fascinée, elle restait là immobile, appréciant le calme alors que la plupart des gens était endormi. Ses insomnies n’étaient pas rares, il suffisait d’un enchaînement de pensées pour que le sommeil s’éloigne. Or, les pensées, ce n’était certainement pas ça qui lui manquait en ce moment entre ses fiançailles arrangées, le fait qu’elle évitait ses parents depuis, les aveux de Gabriel …
Elle ferma un instant les yeux, inspirant une grande bouffée d’air. Elle n’avait de toute façon nullement l’intention de retourner au lit alors autant qu’elle descende boire quelque chose de chaud, ça pourrait peut-être l’apaiser. Si ce n’était pas le cas, alors elle finirait sans doute par aller frapper dans un sac, histoire d’évacuer toutes ces tensions. A l’intérieur tout était silencieux, les quelques membres de la meute présents dormaient à point fermé. Elle pénétra dans la cuisine sans un bruit, se dirigeant vers la cafetière pour la mettre en route puis s’attrapa une tasse et une cuillère, déposant le tout sur la table. Distraitement, elle avait attrapé un magazine que quelqu’un avait dû oublier là hier soir, tournant les pages jusqu’à ce qu’elle puisse se servir une tasse dans laquelle elle ajouta un peu de lait avant de s’asseoir sur l’un des tabourets hauts et en boire quelques gorgées.
« Aurora ? Tout va bien ? » La rousse releva aussitôt la tête vers son alpha. Attendait-elle une réponse honnête ou était-ce juste une de ces banalités d’usage ? En l’observant brièvement, elle comprit, à la fine pellicule de sueur recouvrant sa peau, qu’elle arrivait de s’entrainer. Elle n’était visiblement pas la seule à ne pas dormir et à avoir besoin de se défouler. Alors elle acquiesça brièvement avant de reporter son attention sur le magazine.
« Tu sais que tu peux tout me dire, je suis là pour ça. » Aurora resta silencieuse. Par où commencer ? Ses prunelles rencontrèrent de nouveau celles si douces et empathiques de Jazz.
« Comment fais-tu ? » finit-elle par laisser échapper.
« Comment tu parviens à toujours être aussi calme et maitre de toi-même ? » Elle l’admirait vraiment parce qu’elle était loin d’avoir son self-contrôle. Certes elle était louve depuis peu mais elle avait toujours autant de mal. Gabriel lui avait dit d’accepter sa nouvelle nature et qu’elle devait apprendre à vivre avec…c’était loin d’être facile.
« Je la sens toujours qui trépigne au fond de moi, qui attend de pouvoir se manifester, de prendre les rênes… C'est épuisant...» Et elle les avait déjà prises à quelques reprises, dévastatrice et impitoyable…
*citation © The Vow